En ce dimanche de recueillement, lendemain d'obsèques, toute l'équipe des Productions J.Kyll tient à souhaiter sympathies et condoléances à la famille, aux amis, camarades et fanatik de Alain Philoctète...
Alain c'est, entre autres grandes choses, le héros du film «Kenbe La» de Will Prosper pour lequel j'ai signé la musique et qui a donc gravé mon inspiration vitale l'année dernière.
On ne sait jamais ni comment ni à quel moment on change le courant des choses, de l'histoire, de la vie…
Pour ce qui en est de la mienne, sur ma ligne temporelle, y'a un avant et un après ma rencontre avec Alain.
Cet homme et sa femme ont mis une lumière et un cri sur la passé silencieux qui m'habite et me forge.
Ils ont posé la hampe à mon étendard et à ma flamberge.
Ils ont pétri mon expression artistique.
Ils m'ont permis non seulement de croire mais d'expérimenter les générations qui me précèdent et tout ce travail qu'elles ont accompli pour que je puisse être présente à mon tour.
Parfois on cherche l'espoir au large de l'horizon. Et voilà que celui-ci nous ramène à notre mémoire.
Alain, merci pour tout...
M pap bliye, papa. Ochan!!! Kenbe la.
« Il n'y a pas d'amour sans lutte »
#SouvenirsDe2020
Ne pas oublier qu’ultimement, c’est encore et toujours c’qu’on est en train de faire : Battre la mesure. Créer de nouveaux souvenirs…
Sortir des ouï-dire et des qu’en-dira-t-on ; Ne se fier qu’au silence avant de faire du bruit, qu’à ce que l’on sait, par soi-même. Ce qu’on a déjà expérimenté…
Qu'est-ce tu vas doser devant l'absolu ? Pis qu'elle part de ta mesure vas-tu lui laisser ?
Un de mes meilleurs moments de collabo de 2020, c’est cette rencontre avec Marie-Gold.
Sincèrement, j’ai dialogué avec plusieurs artistes de la relève au courant des années. Or, le face-à-face avec MG pour moi s’est vraiment distingué. La personne au-delà du personnage, je l’ai trouvée mature dans sa drive, déterminée dans son laisser-aller et humble dans son assurance, ce qui lui donne une perspective très étendue et réaliste dans ses ambitions et aspirations.
Conversation super franche et fluide.
Au final, ça a donné ça : Doser
C’est la dernière pièce de son nouvel et premier album, Règle d’or, sorti il y a deux jours, qu’elle m’a invitée à conclure.
Album très fidèle a ce qu’elle est réellement alors j’ai kiffé. C'est un honneur.
Et je lui ai offert tout ce que j’ai ressenti en cet instant.
Que du love.
Merci pour cet échange très humain, MG. Et longue route ! You got the floor…
▶️Écoutez la chanson et l'album
J’ai ouvert la fenêtre ce matin, aux petites heures.
Comme elles sont grandioses, les petites heures !
C’est le chant glorieux d’un oiseau qui m’a interpellée, me l’a recommandé.
Annonciateur du printemps arrivé… ou du printemps avenir ?
Ça sonne comme une comptine d’enfants, n’est-ce pas ?
J’espère encore que tous les enfants du monde s’éveillent au chant des comptines.
« Ne laisse pas l’hiver s’éterniser et traîner ses bottes chez toi.
Pèlerin, je m’excuse d’oser te le dire mais tu dois reconnaître ton temps comme tu reconnais ton temple ; Il est l’heure pour toi de rentrer. »
Il y avait longtemps que les ramages ne traversaient plus mes vitres ( ou mes tambours ? ) , obscurcis par le bruit des déplacements humains…
Mais nous voilà tous confinés désormais, dans nos occupations fanées
Chute effrénée,
Tomber des cieux sans sol.
Rien d’nouveau sous l’soleil ;
Il est si loin de nous. Alors ? Qui croit encore qu’il se sent seul ?
Le spectacle profané des engagements sans soldes
Les vertus affinées de la fainéhantise affamée
Plus de faits, plus de faux
Plus de noir, plus de blanc
Que des tons choisis chez l’teinturier, badigeonnés sur des drapeaux.
Des récits de flamboyances, de guerres et d’amours à distance, de mémoires sous des chapeaux
En signe de “crois”
Si l’chapeau te fait, porte-le…
Le vent se déchaîne dans les cheveux des masques décoiffés à la queue-leu-leu.
Si l’chapeau te porte, porte-le !
Ou défonce-toi aux instants malheureux.
Ou défonce-toi.
Que des nuances d’ignorance dans l’espérance de la raison.
Et du coup, soit vite fait tu dégrises, soit tu t’en “ fou ”,
soit tu t’en soûles.
Car si l’oisiveté est mère de tous les vices, peut-t-on la blamer de vouloir nourrir ses enfants ?
Et ceux-ci, révoqués, renvoyés à leurs nids, de pleurer la souvenance des planches qu’ils foulent ?
Comme disait Laborit, l’homme n’est qu’une mémoire qui agit.
J’espère encore que se souvenir assagit.
Nous voilà tous confinés dans nos obligations fanées
À tâtonner l’incertitude, à s’imaginer la clarté aux lueurs et murmures de nos connaissances.
J’me souviens de mes potes en’d’dans qui m’disaient que la liberté se trouve entre les murs.
Hey les gars, est-ce que j’dois me méfier alors de son goût amer ?
Ou m’en familiariser tout comme je m’accoutume à ma propre amertume ?
Car nous voilà tous confinés à nos êtres fanés.
Qu’en reste-t-il de vivant ? Ou que reste-t-il de la vie ?
Sinon ce souffle qui a toujours traversé nos soupirs
Et nos soupiraux pour rentrer chez lui,
Nous attendre en silence.
Dans le cadre de la semaine précédant la Journée internationale des femmes, Alexandra Guellil nous a interviewées Marie-Gold et moi pour discuter de l'histoire de la place des femmes dans le Hip Hop québécois, de nos débuts jusqu'à aujourd'hui.
On a passé la journée ensemble dans les studios de MG, le temps de se mettre vraiment à l'aise pis de se dire les vraies affaires sur toutes sortes de sujets qui nous concernent de par nos expériences vécues et de nos observations sur le terrain.
On a donc discuté histoire, art et inspirations, engagement social, politique, maladie mentale, raisonnements du métier et évidemment, féminisme dans l'art et dans le rap.
Salutations à toute l'équipe de L'Itinéraire.
Alexandra, merci pour les excellentes questions et pour le condensé bien récapitulé de cet échange. Je sais pas comment tu as réussi à le faire ;)
Encouragez les camelots ! C'est seulement 3$ !
L’Itinéraire s’est donné pour mission d’accompagner des personnes marginalisées, exclues du marché traditionnel du travail, ayant connu l’itinérance, la dépendance, ou souffrant de problèmes de santé mentale. Au fil des ans, environ 2500 personnes ont amélioré leur qualité de vie par la rédaction et la vente du journal de rue.
C'est aujourd'hui que sort en salles le film Kenbe la (dont je vous ai parlé plus bas) pour lequel j'ai composé la trame sonore.
Évidemment, on a fait l'tour cette semaine pour promouvoir cette sortie.
J'ai envie de surligner cette entrevue lors de mon passage à l'émission “ Qu'est-ce qui se trame ”, animée par Philippe Béland, qui m'y a invitée pour ne parler que de l'art, que de l'oeuvre, que de musique et de mon procesus de création pour ce docu.
Je ne m'y attendais pas. J'me suis carguée dans ma chaise, sourire aux lèvres...
'Sti qu'ça fait du bien de prendre le temps de vous partager ma fonction, mon métier, mes outils, mes procédés et tout ce qui habite corps et âme mon travail, partant de l'inspiration à l'intention, à la réalisation.
Désolée de vous dire ça en ces termes sacrés mais je tenais à rester fidèle à c'que j'ai ressenti et c'est exactement ce que je me suis dit en fermant les micros. Car cette proposition est rare. Très rare.
Pourtant, n'est-ce pas étonnant à quel point tout ce qui est de l'ordre de l'engagement social comme de la promotion est automatiquement couvert dès lors qu'on cède la place à l'essentiel : la relation entre l'artiste, l'oeuvre et le public. That's it. Tout le reste est superflu.
« Je ne sais pas si on est nombreux ici à s'intéresser aux trames sonores, aux détails de l'inspiration, aux instruments et aux techniques de création mais c'est un public qui existe, qui écoute. On est là. Et on est heureux quand le compositeur pense à nous. C'est un peu ça que reflète cette émission. » me disait Philippe en sortant des ondes.
Et bien mon cher, c'est totalement réciproque. Car je pense beaucoup à vous à chaque fois que je crée. Et même à chaque fois que j'me déplace pour en parler ou pour dériver dans quoi que ce soit d'autre sous la bannière de l'art.
Merci beaucoup pour cet échange agréable.
Vous pouvez écouter l'émission ici : http://c1f2.podcast.ustream.ca/a/207398.mp3
L'entrevue commence à 30 minutes. Mais je vous recommande l'intégral.
Qu'est-ce qui se trame, c'est tous les lundis de 10h30 à 12h00 sur CISM
Et reconnaissance aux radios universitaires et communautaires pour le ton juste, les propos enrichissants, pour les approfondissements.
Kenbe la est présenté dès ce soir à la Cinémathèque québécoise et est en tournée partout au Québec.
Cliquez sur le site de la Cinémathèque pour les horaires et pour voir la bande annonce.
Ceci n’est pas un écriteau
Mais un cri du coeur
J’écris dans l’ciel
Que cette année 2020 nous soit existentielle.
Si le spectacle doit continuer,
Qu’on y mette de l’amour, qu’on y mette du vrai, qu’on y mette du beau
Parce que c’est ça, rien qu’ça qu'on célèbre réellement derrière les rideaux.
Le triomphe ?
Ne laissons pas les applaudissements s’estomper dans l’silence qui ronfle,
couchés sur le dos, affalés dans la défaite
des lendemains du temps des fêtes,
les yeux grands ouverts rivés au plafond
dégoulinant de rêves assommés en plein vol…
Party on!
Et cheers à tous ceux qui s’réveillent
Et à tous ceux qui s’révoltent
Pour crier “ Présent ! ”
Célébrons tout ce que nous savons, tout ce que nous avons, tout ce que nous sommes déjà.
Mercredi le 11 décembre, j'ai été invitée par les animateurs de cette émission à discuter avec eux de la place et de l'influence du et de la politique sur le mouvement et la création artistique du Hip Hop au Québec.
Déjà, le sujet m'a nettement intéressée.
J'ai totalement fait la paix avec l'idée que ma personne transcende mes oeuvres et qu'on m'appelle encore plus souvent pour moi que pour elles.
Franchement, je me sens vraiment privilégiée du fait que les différentes factions de la société invitent mon jugement, ma pensée, mes reflexions à la table pour aider à comprendre et à construire l'avenir. Ça me fait sourire. La vie est ainsi régulée. Je constate la portée de toutes ces longues discussions de jeunesse, le fruit de mes études en philo et le pouvoir de la somme de mes choix autonomes.
Donc ouais, c'était d'bonne heure le matin mais j'ai accepté l'invitation. Aussi parce que c'était d'bonne heure en fait. L'écoute des ouvriers qui vont sur les bancs qui mènent à la job, elle est attentive et capitale (dans tous les sens du terme).
Vous pouvez écouter ça ici : http://c1f2.podcast.ustream.ca/a/204263.mp3
Allez à 1:05:00 pour vous rendre directement à l'entrevue.
Salutations à toute l'équipe de l'émission. Ça fait du bien de parler de sujets progressistes. J'applaudis votre direction de contenu.
Et c'est essentiel que le Hip Hop reprenne la parole qu'il a revendiquée dès sa fondation, debout face aux grands enjeux politiques de nos sociétés.
Let's drip it up, attitude pas care-risme, dégaine...appelle ça comme tu l'sens, c'est tout bon. J'adore. J'adhère.
Mais élevons tout ça au-dessus du fuc#@$! fake populisme démagogue privé qui crève la dalle derrière les rideaux.
“ Les meilleurs partys se paassent dans la cuisine ”, c'est à tous les mercredis de 7h à 9h am sur CISM
Ce 19 novembre dernier, c'était la grande première mondiale du film « Kenbe la » dans le cadre des RIDM, au cinéma du quartier latin.
Kenbe la, c'est le magnifique film documentaire produit par l'ONF et réalisé par Will Prosper dont je vous ai parlé récemment, pour lequel j'ai composé la trame sonore. Quel beau trip.
Je ne veux pas vous révéler le scénario car il mérite vraiment d'être traversé en temps réel sur grand écran.
Comme je l'ai dit souvent, moi dès que j'en ai vu les premiers jets, j'ai été habitée par l'histoire, les personnages, le vécu, la sensibilité de l'oeuvre et ceux-ci ne m'ont pas quittée ni avant, ni pendant, ni après la composition de la musique.
J'ai sous-titré « Konbatan » mon propre site web cette année car c'était le titre de travail qu'on utilisait pendant toute la prod.
Effectivement, quand on termine le visionement de ce film, on ressent très bien ce combat que tout homme qui sait vivre doit mener en lui mais surtout, on partage aussi cette paix qui en découle quand on sent, quand on sait que notre histoire personnelle appartient à l'ensemble de l'humanité.
Cet instant de célébration en fin de soirée après la première, au Ti-Agrikol (by the way, merci aux gens d'la place pour l'accueil, c'était chaud) c'était magique. Du pur bonheur. J'ai eu l'honneur de performer et de mixer jusqu'à ce que le temps nous oblige à quitter les lieux.
Alain et Chantal, personnages principaux du film, que j'aime profondément et considère désormais comme ma propre famille pour ne pas dire comme mes propres parents (vous comprendrez pourquoi en voyant le grand oeuvre) étaient assis première rangée, direct devant moi.
Je retenais mes larmes pendant toute la perfo, espérant que la musique puisse parler mieux que moi, sans se contenir.
André Courcy était naturellement à la guit à mes côtés. Mon frère Imposs est venu performer quelques morceaux avec moi. Tout l'monde planait dans le p'tit bar. C'était sincère. C'était vivant. C'était marquant à vie.
Quand je suis rentrée ce lundi et qu'on m'a appris que le film avait remporté le Prix du public aux RIDM en fin de semaine, je suis restée bouche bée.
Tu bosses sur une oeuvre, tu feel de quoi puisamment mais tu n'sais pas si le public va ressentir c'que toi tu conçois !
Cet échange d'émotions, d'énergie, c'est pour ça qu'on fait ce métier. Alors les prix choisis par le public seront toujours les plus gratifiants.
Et c'est en tant que part du public moi-même que je remercie toute l'équipe qui a travaillé sur le film, à commencer par l'ONF pour le risque précurseur.
Merci à Alain et Chantal pour tout ce savoir vivre qu'ils nous transmettent.
Et merci à Will Prosper pour la réalisation gracieuse, harmonieuse, juste de cette oeuvre universelle.
Merci pour ta confiance Will.
Aller sur la page Facebook des Productions J.Kyll pour lire les remerciements
Je me suis débattue longtemps pour écrire ce texte. La parité ? Encore la parité ?
J'ai l'impression d'avoir déjà tout dit sur le sujet, tout entendu aussi. Au point tel que dire encore, c'est presque contribuer à nous embourber dans le marasme du faux progrès. Celui qui croit et prétend régler tant de choses simplement parce qu'il les nomme encore et encore. Comme si nommer l'effet, le décrire sous toutes ses facettes, suffisait à le métamorphoser, suffisait pour le faire évoluer vers le mieux sans même identifier sa cause.
C'est donc un peu ça que j'ai choisi de dire cette fois. Le geste fractionné d'hésitations, toutefois.
Le mot “ parité ” lui-même, son abstraction platonique commencent à me saouler ben raide, j'vous dis.
J'en ai marre d'être là pour crier que je ne suis pas. Je suis là pour dire que je suis.
Alors, I'm gonna break it down to you one more time. Pis après, j'me relève et on parle de sommet, de culminance, de hauteurs, de vertiges, de vues d'ensemble, d'horizons, de zénith... C'est bon ?
J'écris...
Tout à coup, alors que j'm'en attendais pas du tout, j'pogne c'qu'on appelle dans l'jargon d'la perfo “ la zone ”.
Celle où l'écrivain touche à une certaine objectivité et devient son premier vrai lecteur (quand l'émotion t'arrache du moment, du crayon, du papier, de l'écran, du clavier et que tu feel tout au présent, même à travers le vécu des autres. Tu ne fais pas que l'écrire, tu le vis. Se souvenir au présent...Ça flow tout seul.) Y'a queck chose de plus grand que toi qui a besoin de se dire et toi, tu ne fais que traduire en mots.
Je mitraille. Non, j'arrose.
J'sors du geste, de la vision en tunnel. J'écris à voix haute.
Je parle...
***
Ce matin (coup'de mois plus tard, revenant de voyage), retour au bureau.
Parmi toute la paperasse qui me hèle, j'ouvre cette petite enveloppe jaune et en sors l'objet : L'Agenda des femmes 2020.
La page couverture est superbe. Je la regarde longtemps. L'illustration du propos est right on. Chapeau à Ravy Puth.
J'sais pas, j'ai même pas encore vu les textes mais juste le fait qu'ils soient posés dans un livre, avec un beau cover dessiné, sur du papier que j'peux flipper, sentir, tordre, offrir en cadeau, lire sans que la lumière bleue m'embrouille l'horizon, ça me touche déjà fortement. Ça m'fait ça à chaque fois.
P'tit effeuillage vitesse avec le pouce. Nice ! C't'un vrai agenda ! Où tu peux inscrire à chaque jour tout ce que tu as à faire pour t'en rappeler. Et à chaque début de mois, tu tombes sur le texte d'une femme ou d'une personne non binaire qui vient se raconter pour contribuer à la culture et à la parité. Se rappeler. Chacun, chacune dans son langage, dans son vécu, dans sa vibe et quand je regarde l'oeuvre que forme le tout ensemble, j'trouve ça vraiment original et attrayant. Constructif. Juste.
Tu peux tout lire d'un coup si tu en as envie. Ou tu peux faire durer le plaisir et le suspens en ne lisant que le texte du mois au fur et à mesure, un peu comme avec un calendrier de l'Avent, tu vois ?
Sauf que derrière les cases, c'est pas du chocolat ou des saintetés qui t'attendent. C'est une réflexion, par des gens du milieu culturel québécois qui nous ramènent à la base, comme dit Clara sur la quatrième de couverture.
Clara Lamy. C'est elle qui est à la direction de l'agenda, qui a harmonieusement écrit l'édito en préface ( qu'elle a pertinemment titré “ Merci pour l'eau ”. Bien pensé. Ça veut tout dire ) et qui m'a invitée à y écrire un texte sur lequel culbute mon regard dès que je tourne la page du mois de janvier.
Aussitôt, j'ai le sourire aux lèvres. Contemplant l'illustration, la mise en page. C'est aussi ça un livre. La matérialité indépendante du texte. L'objet qui transporte les mots. C'est une oeuvre en soit, même avant les mots !
Je me relis rapidement.
Je me souviens de tout ce que j'ai voulu dire...
En me relisant, j'ai l'impression que tout ce qui s'entend encore a besoin d'être dit.
Que chaque percussion qui se répète finira par créer une exaltation de masse,
Une transe ou une cassure.
Que ça prend de l'audace et non d'la censure
Pour entendre c'qui s'passe entre chaque coup d'tambour, chaque coup de hache,
Les variantes, les twists, les craquements
Entre chaque pléonasme.
Trop de silences feignent la quiétude
À défaut de dire la turbulence, les battements, la faille.
De peur de dire par habitude.
Car c'est l'habitude qui nous harasse,
Nous apprivoise, nous domestique...
Ou nous désuétude puis nous mastique. Nous tenaille.
Trop de silences qu'on ignore, bousculés par le chahut
Et y'a ceux-là, aux pieds du mur, sur des perchoirs, dans des volières
Ces captures indécentes qui ne nous appartiennent pas, qu'on observe par-dessus nos oeillères, impuissants,
alors qu'elles attendent leur salut
Trop de silences me sourient, me tendant leurs convoitises, leurs appâts,
Leurs vides abyssaux cachés sous la paille
Et y'a ce silence qui par le dos m'attrappa, like a hook, catchy, posant une main sur mes lèvres, real slow
et l'autre, autour de ma taille...
Mais je parle.
Et j'parle fort.
Vous êtes-vous déjà demandé qui a réellement droit à la parole ? Et ce que dit leur silence ?
Entre tous ceux qui disent et tout ce qui n'a pas été dit, sommes-nous réellement à égalité ?
Entre la parole et le silence, lequel des deux veille sur l'autre, en réalité ?
« Vous avez le droit de garder la parole. Mais tout ce que vous tairez sera retenue. Contre vous. »
Le silence n'existe pas s'il n'est pas porte-voix, s'il ne naît pas pour servir tout le bruit qu'il veut faire entendre.
J'imagine que c'est pour ça que je me dis encore. Que j'ai une grand'gueule pis qu'j'me retiens pas.
Pour dire tout simplement que même lorsque j'me tais, c'est pour qu'on m'entende.
Qu'on entende les sommets, les culminances, les hauteurs, les vertiges, l'horizon, les vues d'ensemble
à chaque pas bruyant que je fais, regardant dans les yeux le silence des cieux.
That's whassup.
Once again, 2 shots au plancher pour tout ce qui m'est égal.
Car le déséquilibre n'est pas qu'un malaise.
Puisque tout est matière and everything matters
Entre les punch lines dans l'arène parce' c'est l'show qui compte
et les pensées qui crèvent là où la parole est illégale
pour quiconque le brise,
le silence est un langage qui parle fort.
Et je veux qu'on le lise
quand c'est à voix haute que j'écris en silence :
I'll always have the floor.
L'agenda des femmes 2020 est disponiblesur le site de Remue-Ménage et dans toutes les bonnes librairies.
Procurez-vous le pour lire mon texte du mois de janvier « Meilleure, ça m'est égale » et les 11 autres auteurs qui suivent l'année.
Merci Clara. Merci Ravy. Super.
À tous ceux et celles qui ont contribué à l'Agenda, très heureuse de faire connaissance.
Mon feeling ?
J'descends à peine de l'avion après avoir passé presque un mois dans les antilles et je vous avoue que le retour est très brutal.
En contraste, ce retour est gris, froid, c'est machinal et tous les gens que je croise ne me parlent que de boulot, de stress et de leur petite vie personnelle de famille à la maison, de possessions à attrapper, à atteindre, à faire siennes et à montrer pour mieux se mesurer, se démarquer des autres, du reste... C'est freakin' lourd.
Je me sens loin du bruit qui m'a bercée pendant tout ce mois, de l'existence commune, tressée même, de la nature, des hommes et de leurs choses, à ciel ouvert, en communication.
Loin de la chaleur et de la lumière du soleil qui reflète sur les feuilles d'arbres, qui nous redresse vers le ciel nous aussi et pour laquelle nous n'avons même pas, pour la nommer, de mot précis.
Il paraît que les allemands, eux, l'appellent “ maeinschein ” et les japonais, “ komorebi ”...
Je me sens loin.
Loin des rires d'enfants qui jouent, complètement nus, dans l'eau, dans la terre, dans les arbres, dans les bras des uns et des autres…
J'ai l'impression de comprendre enfin ce que veut dire la phrase “ tous les hommes sont nés égaux ”.
Cette proposition, j'la répétais en voulant bien y croire mais en réalité, j'en doutais. Trop d'injustices, man. Trop d'écarts...
Tu vois, en mettant les pieds ailleurs, dans certains parages, descendant de notre sécuritaire et de notre comfortable, de notre mécanique rassurante, de notre futur présent qu'on ne cesse d'espérer, de nos saturations insatiables, on a le réflexe de se dire “ Mais comment font-ils ? Comment font-ils pour vivre, les autres, les pauvres, dans le chaos, dans le vacarme, dans la souillure des survivances constantes ? Sans...ordre ? Sans...régularité ? ”
Mais après un moment, on s'entend penser ! Les ordres ? La régularité ?
On entend leur bonheur, aux pauvres, qui resplendit quoi qu'il en soit ! On entend leur vécu, leur cadence spontanée, innée, on entend les casseroles, les assiettes et les verres qui se partagent matins, midis et soirs, les engueulades, les éclats de rires, les effondrements et les constructions, les trocs, les échanges de c'que tu veux, les discussions philosophiques, politiques, spirituelles, engagées, la musique qui se fond aux vagues de la mer, on entend le vivant !
On ne sent plus que le poids écrasant de la masse sur nos têtes mais la valeur de l'ensemble sous nos pieds ! Et ça feel comme un peuple, comme une humanité.
C'est alors qu'on comprend que chacun a ce qu'il faut, quoi ! Que chacun a quelque chose à offrir qu'un autre n'a pas.
Quelque chose avec quoi composer l'existence !
Que tous les points sur la carte du monde peuvent être point de départ. Et qu'on finira tous par nous rejoindre. Que personne ne naît dans le mauvais pays !
Faut vraiment se croire plus important que l'on est pour regarder quiconque de haut, ouvrant bien grand sous nos bras notre cape de pitié, ne voyant toujours qu'avantages et désavantages à opposer.
Damn bro! Pourtant, à mes yeux, je les trouve si effervescents, les pauvres, dans toute leur richesse !
Et c'est alors que suis reconnaissante pour tout ce que moi j'ai reçu. Car tout ce qu'on ose dire que l'on possède, on le reçoit des mains de ceux qui l'ont bien avant nous ou du manque de ceux qui ne l'ont pas et l'équation est si simple.
Tout est à nous car rien ne nous appartient. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout s'échange.
La richesse des uns fait la pauvreté des autres ? OK. On le sait, ça.
Mais la pauvreté des uns ne veut pas nécessairement de cette richesse des autres.
Car la richesse pour l'un est pauvreté pour l'autre là où le vice versa.
Je comprends que tout ce qu'ils ont encore, tout ce qu'ils sont encore, ces gens d'une autre fortune, de si vivant, de si humain, de si honnête, c'est ce que nous, en échange de je n'sais quoi, nous avons laissé aller : le mouvement naturel de l'existence qui honore sa survie avant sa fantaisie, avant sa production ! (cause if the show must go on, ça lui prendra tout de même un réel à romancer, duquel il ne pourra jamais s'affranchir). Le mouvement naturel qui n'a ni le temps ni le soit disant privilège de rester immobile, à s'ankyloser, le coeur battant la chamade, enlisée dans l'angoisse fataliste de la peur du mépris illusoire dans le regard de la parade.
Point de départ
Nous sommes tous nés égaux.
Ni enfer, ni paradis, que la parade, la parodie et l'envers du décor,
La fin que chacun de nos actes prédit...ou renie.
Ça fait que j'm'ouvre une bière,
Trinque à la vie.
2 gorgées au sol pour tout ce qui nous est égal.
Nous sommes tous nés ego.
Lumière.
Nous conjugons tous l'avoir et l'être.
Avoir sa part, devenir être à part...
Tout acte de vivre ne veut que faire sa part !
Se voir partout. Sinon, nulle part.
Où tu t'en vas ? Point de départ.
Se rapailler là où il reste
S'éparpiller là où il part
Et je sais que je ne rentre à la maison que pour ça ;
Pour jouer mon rôle.
Pour toucher l'sol et questionner mon soul.
Pour mieux quitter
Que chaque aller se rappelle à qui il revient.
Aquitter toutes les solitudes de l'ubiquité
Car peu importe ce qu'il reste de chaque départ,
Peu importe qui se gagne, peu importe qui se quit
À la fin, nous serons tous quitte à quitte.
Première activité publique à laquelle je suis invitée à participer au lendemain de mon retour.
Franc parler, j'arrive complètement crevée et malgré tous ces constats que je viens de vous partager en essayant de tenir ma suffisance en laisse, mon premier automatisme est de me demander « Heille ma fille, mais qu'est-ce tu fous ici !??? »
C'est échevelé, bancal, je ne sais pas à qui me référer, personne ne m'a dit ce qu'il fallait que j'y fasse, ce qu'il fallait que je vienne dire... C'est quoi l'deal ? C'est quoi au juste Hoodstock ?
Comme je suis arrivée seule, j'baisse mes gardes. J'commence à parler à tout l'monde, je slack sur l'ordre et les régularités et je me laisse tranquillement porter par la vibe.
Boom. Tout s'agence...
J'entends la musique, j'commence à bouncer la tête. Je sens l'odeur du barbeq, j'vois les gens de toutes provenances ethniques qui se régalent. Je reconnais les cris et les rires des enfants qui me bousculent et j'trouve ça adéquat. L'enfance, c'est l'âge où il faut apprendre à tout bousculer. Je regarde les aïeuls qui ont le sourire aux lévres en écoutant les ados parler de rêves et d'espoirs, utilisant des mots et des concepts qu'eux-mêmes n'avaient pas encore acquis à leur âge. Fierté. Elle est belle l'évolution. Et on ne doit pas l'oublier. Le progrès que l'on est, auquel on passe le relais et qui un jour visiblement nous dépasse, c'est lui qu'il faut faire briller.
Hoodstock, on s'élève.
Je prends la parole...
Le soleil se couche, comme pour mettre l'ambiance.
Les gens m'accueillent en me chantant La vi ti nèg.
Je leur offre mon coeur, ils m'offrent le leur et on discute ensemble de tout, de carrière, de féminité, de la jeunesse, d'argent et d'économie, de politique, de spiritualité, d'engagement social, de la vie...
Ça dure une heure. C'est fluide, facile, naturel, harmonieux.
On finit ça en chantant en coeur « Se pou sa nou rasanble ».
Je suis à la maison.
Je suis rentrée pour ça.
Montréal-Nord, stand up!
Merci à tous, pour tout.
Don, well done. Pour l'ensemble de l'oeuvre, jusqu'à ce jour.
Will ! On sait c'qu'on veut, sans demi-mesure. On y va. C'est à nous.
Big up à l'équipe du Hoodstock et bon 10e.
Merci à tous ceux qui m'ont élevée, peu importe où et d'où nous sommes.
Petite historique du Hoodstock dans le Cahier du socialisme
Je suis en ce moment à 5000 km de chez moi, à St-Laurent du Maroni.
C'est magnifique, inspirant, à vif et c'est à la source même de l'existentiel.
J'écris et compose la musique d'une pièce de théâtre à venir, outillée du simple minimum qu'il faut pour vivre et pour être créatif, hébergée dans une petite cabane avec toute l'équipe et les comédiens talentueux et terre-à-terre, posée sur le bord du fleuve.
Méditation active.
Les mots et les notes se ruent sur mon portable.
Ça fait 20 ans que je me raconte, que je raconte mon milieu. C'est un honneur et un privilège que d'être invitée à voyager pour faire immersion dans l'ailleurs, pour voir d'autres façons de se tenir debout, de se construire, de devenir, de créer, pour expérimenter avant de raconter l'universel, le réel qui nous concerne tous.
Quelle expérience extraordinaire et vivifiante. J'ai hâte de vous la partager.
Comme l'oiseau...
À suivre, pour 2020...