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Dans la rue bnw

Pendant le mois de septembre de 2020, Guillaume Soucy et l’organisme À portée de mains ont eu la brillante initiative de diffuser un projet de multimédia éphémère sur les murs du quartier St-Michel à Montréal.
L’idée était de synchroniser les poèmes ou textes de différents écrivains (un/une par semaine) sur des images et de la musique en toile de fond.
Ils m’ont contactée pour me proposer de faire partie des auteurs. Ils m’ont dit “St-Michel, poésie, réverbérée direct sur les murs et corner des petites rues et avenues passantes…
J’ai répondu : « C’est cool. Présente. C’est le moment de se redonner à la source. »
Et j’ai écrit un texte pour l’occasion. 

En arrivant sur place, j’étais pas certaine de mon feeling initial.
J’me suis demandé quel était le réel entrainement du geste puisqu’il n’y avait pas eu de promotion et donc pas de foule sur les lieux.
Mais quelque chose, de l’ordre du subconscient, m’a gardée plus longtemps que prévu sur place. 
Puis comme j’écoutais la musique et lisais mon texte qui se répétait en boucle, imprégné dans cet environnement et surtout, dans les regards des citoyens qui passaient avec leurs quotidiens dans les mains dans leurs démarches existentielles, j’ai tout pigé. 
J’ai compris que cette boucle faisait son oeuvre dans le temps…

Ce sont les passants, les habitants du quartier qui nous l’ont dit puis nous ont remerciés de leur offrir une parcelle d’âme, ce quelque chose qui retient leur attention et leur parle, à eux !

« On voit jamais ça ici ! D’habitude, faut se rendre au Centre-Ville pour avoir accès à cet art là ! Ça fait du bien que ça vienne à nous…»

« Merci de faire ça pour nous, le vrai monde. De nous parler dans le langage du vrai monde, ici, direct où on habite ! »

« Ah! Ça c’est super pour les jeunes du quartier qui passent pis qui ont pas l’choix d’entendre, de voir pis de lire ça, construit pour eux, par quelqu’un qui vient d’la même place qu’eux… bravo. »

Voilà.
Voilà à quoi ça sert l’éphémère qui s’imbibe à vie dans le coeur et l’esprit de ceux pour qui il a été créé. 
Merci.

Dans la rue

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J’habite, rue de la Case Départ. 

Départ…

Ça peut vouloir dire “partir”, ça peut vouloir dire “commencement”. 

Je n’écris pas de discours. Je ne fais pas de politique.

J’écris des oeuvres d’art.

Mais comme dirait Godin, vous et moi, on fait à peu près le même métier ;

On fait de l’ensemencement…

On écrit l’histoire.

En quelle langue ?

Parlons économie, puisque c’est elle qui attire l’attention que tout l’monde écoute :

Qui que nous soyons, quoi que nous fassions, le compte, 

mès qu’on arrive au boutte,  

c’est l’éducation qu’on cède à nos enfants, c’est la culture qu’on leur transmet qui va parler pour nous, qui parlera de nous.

Quelques mots sur ce mur pour être entendue

Où chaque ligne est mince entre tendre l’oreille et tendre vers la peur,

Entre tendre la perche ou laisser choir…les autres, l’ailleurs.

Demandez à Miron s’il n’entendait pas Phelps ou Legagneur 

dans La Batèche du Perchoir

Cette culture, y’a déjà longtemps qu’elle nous entend.

Écoutez l’jargon phosphorescent de notre jeunesse 

quand elle regarde son futur dans les yeux, 

qu’elle fait “vag ” sur le puritanisme cafardeux. 

Car le quartier peut devenir la case 

mais cette case peut devenir lakay 

quand elle brille et qu’aux flambeaux de chez Nous, elle se baille.

Alors cette culture, croyez-vous qu’elle peine me à dire d’où je viens ?

Qu’elle sait me recevoir quand chez moi je reviens ? 

Car là où elle va, tout l’monde sait ce qu’elle vaut.

Il y a déjà longtemps que le monde nous entend…

Que le monde nous attend.